La musique aux XIIe-XIIIe siècles

Publié le par Wilfrid de Nancey


Entre 1100 et 1250, on peut voir deux écoles se succéder dans le cadre de l’enseignement musical :
 
-         L’Ecole d’Aquitaine dite St Martial de Limoges (1100-1160),
-         L’Ecole parisienne dite Notre Dame (1150-1250).
 
Ces écoles vont transcender la polyphonie qui avait vu ses débuts dans le traité de théorie musicale du IXème siècle « MUSICA ENCHIRIADIS » attribué à Hucbald de St Amand (ce pseudo désignerait Ogier de Laon) ainsi que dans un ouvrage de philosophie « DE DIVISIONE NATURAE » de Jean Scot Erigene (vers 876)
  
L’école d’aquitaine (1100-1160) :
 
Hucbald de Saint Amand définit au IXème siècle le chant polyphonique ou Organum comme la réunion harmonieuse de voix différentes. La voix principale –vox principalis- chante un fragment de plain-chant, accompagnée de la voix organale ou ornementale –vox organalis- à intervalles de quintes ou de quartes.
 
[plain-chant : appelé communément chant grégorien du nom du Pape Saint Grégoire qui en fixa les règles au début du VIIème siècle. Il faut faire attention, car certains milieux ecclésiastiques (surtout monastiques) réservent le nom plain-chant aux productions des XVII et XIIIèmes siècles.]
 
Il se trouve des risques de sonorités dures et fautives comme à la quarte augmentée (le tri-ton FA-SI) dite « Diabolicus in musica ». Hucbald prévoit donc en ce cas que l’on pourra suivre la voix principale non pas en parallélisme strict mais avec une certaine fantaisie. Les organum à la quinte ou à la quarte se terminent sur l’unisson ou l’octave pour donner une impression de repos.
 
Jean Cotton d’Affligem abandonne l’organum strict et définit vers 1100 dans le « DE MUSICA CUM TONARIO » deux nouveaux procédés :
 
-         la multiplication par deux ou trois des notes de la voix ornementale pour une seule note de la voix principale,
-         la pratique du mouvement contraire par laquelle deux voix se livrent à un jeu d’éventail ouvert et fermé sur les partitions
 
C’est cet organum dit « libre » que pratiquera l’école Saint Martial de Limoges. De la fin du XIème au milieu du XIIème, son rayonnement s’étend sur toute la région Aquitaine. Elle est renommée pour ses troubadours et sa poésie lyrique latine.
 
C’est à Saint Martial que l’on attribue le premier organum non improvisé intitulé « IN OMNIBUS REQUIEM QUAESIVI »
 
L’organum Saint Martialien, désormais œuvre de compositeurs, présente une grande amélioration : la voix principale, en valeurs allongées, soutient des guirlandes ornementales contenant jusqu’à vingt notes. En ce sens on peut déjà lui accorder le nom de « teneur » (d’où viendra ténor) car elle « tient » le contre-chant.
 
L’école de Notre Dame (1150-1250) :
 
L’école de Notre Dame diffère de celle de Saint Martial en ce sens qu’elle n’appartient pas au cercle monastique, mais épiscopal.
La musique y est enseignée avec les disciplines scientifiques dans un programme d’études appelé « quadrivium » (arithmétique, géométrie, astronomie et musique).
 
Cette école tire ses sources de quatre manuscrits :
 
-         le manuscrit de Florence,
-         le manuscrit de Madrid,
-         les deux manuscrits de Wolfenbüttel.
 
Les grandes figures de Notre Dame :
 
Maître Albert (magister Albertus) : Chantre de la cathédrale, serait l’auteur d’un conduit à trois voix figurant dans le « CODEX CALIXTINUS » vers 1140, manuscrit de Saint Jacques de Compostelle.
 
Léonin (magister Leo) : est reconnu uniquement par l’auteur d’un traité de 1275 environs (désigné comme l’ « anonyme IV dans la classification du musicologue E de Coussemaker (1864)). Il serait l’auteur d’un grand livre sur l’antiphonaire et le graduel : « MAGNUS LIBER ORGANI DE GRADALI ET ANTIPHONARIO PRO SERVITIO DIVINO MULTIPLICANDO »
 
Perotin (magister Perotinus) est aussi cité par l’anonyme IV comme « OPTIMUS DISCANTOR » (le meilleur deschanteur) ou le plus riche inventeur de contre-chants mélodiques. On lui attribue « VIDERUNT » (1198) et « SEDERUNT » (1199), deux organas à quatre voix.
 
L’école de Notre Dame va traiter plusieurs formes musicales, l’organum, le conduit et le motet.
 
L’organum de Notre Dame est à deux voix au départ. Il solennise le plus souvent le graduel ou l’alléluia de la messe. Seule la partie supérieure (voix organale) est composée, la voix grave (teneur) citant textuellement le plain-chant.
 
Ce n’est pas une forme homogène, aux passages polyphoniques à vocalises succèdent des phrases de plain-chant monodique ou des passages en style de conduit (composition originale paralithurgique à une ou plusieurs voix sur vers latins ).
 
Dans le style orné ou à vocalises, la teneur est en valeurs longues, excédant parfois une respiration de chanteur. Il convient donc d’établir des reprises de souffle à l’intérieur du groupe vocal, ou de confier cette voix à un instrument à son tenu, l’orgue par exemple.
 
Le motet (lat. motetus, petit mot) est une mise en polyphonie du plain-chant, comprenant des paroles nouvelles aux voix supérieures. Il se développe au début du XIIIème siècle à partir de la clausule d’organum.
 
 Bien sûr, l’organum ne s’arrête pas, mais il n’est plus d’actualité, et le terrain de recherches se déplace vers le motet et le conduit. 
 
SOURCES :
 
- Histoire de la musique, par Marie Pierre BELTRANDO-PATIER
- Encyclopédie de la musique, Ed FASQUELLE.

Publié dans Vie culturelle

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
F
<br /> Très intéressé par cette page sur la musique médiévale et l'école de LImoges.- Rxiste-t-il des enregistrements significatifs de ces musiques anciennes ?  Merci<br /> <br /> <br />
Répondre